C’est la deuxième conversation téléphonique en moins d’un mois pour Joe Biden et Vladimir Poutine. Jeudi soir 30 décembre, les présidents russe et américain ont passé près d’une heure au téléphone pour tenter de déminer un contexte international particulièrement tendu autour de l’Ukraine.
La Maison Blanche s’est contentée de diffuser une photo de l’entretien : Joe Biden, téléphone à l’oreille, stylo en main, installé dans l’ambiance feutrée de son bureau tout en lambris acajou de sa résidence de Wilmington dans le Delaware où le président des États-Unis passent ses fêtes de fin d’année, rapporte notre correspondant à Miami, David Thomson. La Maison Blanche fait également savoir que cet entretien réalisé à la demande de Vladimir Poutine a duré 50 minutes.
Et comme le premier coup de fil début décembre, ce deuxième appel visait pour Washington à faire prévaloir la « voie diplomatique » pour sortir de la crise générée par le déploiement depuis deux mois de dizaines de milliers de soldats russes à la frontière ukrainienne. Tout progrès diplomatique nécessite une « désescalade » en Ukraine, a plaidé Biden auprès de Poutine
Le locataire de la Maison Blanche a clairement fait savoir à Vladimir Poutine que les États-Unis et leurs alliés répondraient de « façon résolue » si la Russie venait à décider d’envahir davantage l’Ukraine. Les Américains vont surveiller de très près les mouvements de l’armée russe à la frontière ukrainienne, a prévenu Joe Biden.
Le Kremlin « satisfait » de l’entretien
De son côté, Vladimir Poutine s’est dit « satisfait » de son entretien téléphonique avec Joe Biden, a indiqué le Kremlin. La discussion a été « franche » et « concrète », a déclaré à la presse le conseiller diplomatique du Kremlin, Iouri Ouchakov. Les États-Unis ont montré, selon lui, leur volonté de répondre aux préoccupations principales de la Russie.
Mais le Kremlin veut des « résultats » sur ses demandes de « garanties » de sécurité. À l’approche de pourparlers russo-américains le 10 janvier à Genève, Moscou ne cesse de répéter que la priorité des priorités est la négociation de deux traités redéfinissant l’équilibre et l’architecture sécuritaires de l’Europe.
Pour Vladimir Poutine, la sécurité de la Russie passe par l’interdiction de tout élargissement de l’Otan et la fin des activités militaires occidentales à proximité des frontières russes, zone que Moscou considère comme relevant de son aire d’influence.
« Erreur colossale »
Des sanctions américaines contre Moscou seraient une « erreur colossale », a prévenu Vladimir Poutine et pourraient provoquer une rupture complète des relations bilatérales.
Lors d’un précédent entretien téléphonique début décembre entre Joe Biden et Vladimir Poutine, le président américain avait menacé son homologue russe de sanctions « comme il n’en a jamais vu » en cas d’attaque contre l’Ukraine. Mais il est fort probable qu’une fois de plus, le locataire de la Maison Blanche a rappelé à son homologue russe la possibilité de sanction économiques inédites contre la Russie et contre sa propre personne s’il s’avisait de franchir la ligne rouge.
La diplomatie va reprendre ses droits
Le simple fait que cette conversation ait eu lieu est en soi un signe, analyse notre correspondant à Moscou, Jean Cassey. Le signe que, peut-être, après des semaines d’escalade verbale et de menaces à peine voilées qui ont fait craindre une guerre ouverte entre la Russie et l’Ukraine, la diplomatie va reprendre ses droits.
Il y a quelques jours, une partie des forces russes stationnées à la frontière ukrainienne est rentrée dans ses casernes. Après le sommet russo-américain du 10 janvier, une rencontre Russie-Otan est prévue le 12 puis Russie-OSCE le 13.
Reste à savoir si ce marathon diplomatique va permettre de résoudre la contradiction profonde qui a provoqué cette crise : inquiète de voir l’Ukraine se rapprocher toujours plus de l’Otan, la Russie exige des assurances que plus aucun élargissement de l’alliance atlantique n’ait lieu en Europe de l’Est. Les États-Unis, eux, ne veulent pas, ou ne peuvent pas, faire cette promesse. Deux positions de principe qui seront difficiles à concilier. Or la Russie, si elle n’obtient pas satisfaction, n’écarte pas un recours à la force militaire.