A la suite de la mort atroce d’Astou Sokhna, la direction générale de l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga avait tenu un point de presse pour dédouaner ses agents. Agée de 34 ans, Astou Sokhna, arrivée au terme de sa grossesse, avait souffert dans l’indifférence totale, de 9 heures 30 à 5 heures 30 du matin, avant de rendre l’âme, selon ses proches.
Malgré les témoignages concordants du mari et de la maman de la défunte, présents au du drame, le directeur de l’hôpital, Dr Amadou Guèye Diouf, soutenait que les agents de la maternité « on fait leur devoir dans cette situation; et en faisant un audit du décès, en aucun moment, il n’est ressorti qu’une césarienne d’urgence avait été indiquée, contrairement à ce qui est apparu dans la presse ».
Des propos qui sont en conflit total avec les éléments établis par la Direction de la Santé de la Mère et de l’Enfant, de la Direction des établissements publics de Santé et de la Chaire de gynécologie de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar, chargés de faire l’audit du décès d’Astou Sokhna; mais aussi avec ceux de l’inspection administrative conduite par l’inspection interne du ministère de la Santé et de l’Action sociale.
Ces deux missions, dont les rapports sont transmis ce mercredi matin au ministre de la Santé et de l’Action sociale, ont taillé en pièces la défense de l’hôpital.
Elles ont confirmé un « manque de coordination dans la prise en charge » d’Astou Sokhna en faisant sans doute référence au fait qu’elle est morte parce que « programmée », comme le martelait sans cesse la sage-femme le jour du drame. Pire, le risque encouru par Astou Sokhna a « été sous-estimé », selon les premiers éléments remontés vers Dakar. Pour combler le tout, les douleurs d’Astou Sokhna ont été « mal évaluées », pour dire en langage profane que l’équipe de garde a fait preuve d’une insensibilité totale alors qu’Astou Sokhna criait et affirmait qu’elle était au bout de sa vie.
Enfin, les inspecteurs sont d’avis que la césarienne ne devait pas attendre d’autant qu’Astou Sokhna, qui avait perdu en 2019 sa fille née prématurément (7 mois), avait bel et bien un dossier médical qui recommandait cette voie pour son accouchement.
A côté de ces procédures administratives, l’enquête de police suit son cours avec l’audition hier-mardi du personnel. Des sources sûres du journal renseignent que les policiers s’orientent tout droit vers les mêmes conclusions que les équipes dépêchées par le ministère de la Santé qui a tenu aussi à présenter mardi, à Louga, ses condoléances à la famille éplorée.
Dans tous les cas, cette affaire doit servir de prétexte aux autorités pour réaliser une enquête globale sur la situation de l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga. Le journal Libération, qui donne les détails de ces missions d’inspection, renseigne que malgré les montants investis, le chantier de construction de la pédiatrie est à l’arrêt depuis plusieurs mois. L’entrepreneur a subitement disparu dans la nature. Conséquence : c’est dans un coin du bloc « Médecine » que loge la pédiatrie avec tous les risques que cela comporte.