« L’ambition et la vengeance ont toujours faim », dit le vieil adage. Et ce ne sont pas Bougane Guèye Dany, Malick Gackou, Thierno Alassane Sall (TAS), Abdoul Mbaye et Alioune Ndao qui diront le contraire. Ces derniers ruminent (pour certains) depuis 2019 leur colère contre le président Macky Sall et son nouveau système non pas de « filtrage » mais de « sélection » à l’élection présidentielle. Très controversé, le système de parrainage avait abouti, en effet, à la sélection de 5 candidats.
L’écrasante majorité des candidats avait donc été mise sur la touche au bout d’un processus polémique. Sur 27 dossiers déposés, les 19 ont été définitivement rejetés. Les dossiers de 5 candidats ont été validés (Macky Sall, Ousmane Sonko, Karim Wade, Khalifa Sall et Issa Sall). Trois autres (Malick Gakou, Idrissa Seck et Madické Niang) en sursis, devaient passer la fatidique épreuve des repêchages et avaient deux jours pour corriger des doublons. Au finish, seuls Idy et Madické ont pu s’en acquitter correctement. Après l’étape du parrainage, celle de la vérification constitutionnelle de conformité des candidatures a scellé deux autres sorts : celui de Khalifa Sall et Karim Wade, devenus inéligibles suite à leur condamnation à plus de cinq ans de prison pour escroquerie et enrichissement illicite.
Ainsi, seuls cinq candidats ont participé à l’élection présidentielle de 2019 : Macky Sall, Ousmane Sonko, Issa Sall, Idrissa Seck et Madické Niang. On aura jamais vu aussi peu de candidats à une élection présidentielle au Sénégal depuis 1988 où seuls 4 candidats étaient sur la ligne de départ pour briguer le suffrage des sénégalais : Abdou Diouf (Ps), Abdoulaye Wade (Pds), l’avocat Me Babacar Niang (Plp) et l’économiste marxiste Landing Savané (Mrdn). 8 candidats étaient sur les starting-blocks en 1993 et en 2000, 15 en 2007, et 14 en 2012. Des données qui semblent justifier les critiques des candidats recalés qui soupçonnent derrière le système de parrainage, la volonté manifeste du pouvoir d’écarter des candidats.
Bougane, Gackou changent de fusil d’épaule face au spectre des parrainages
Éliminés de la course dans des conditions qu’ils ont jugé très louches, les candidats recalés n’avaient pas caché leur amertume. « Comment fonctionne le logiciel ? Et dans les mains de qui est-il ? Les juges constitutionnels ne sont pas des informaticiens ! s’insurgeait l’ancien premier ministre Abdoul Mbaye doutant de la fiabilité du système. La loi nous réclame deux formulaires : l’un sur papier, l’autre électronique. On ne peut pas exclure une erreur de saisie sur ce dernier, mais la loi prévoit qu’en cas de litige on se tourne vers la fiche sur papier. Or l’on privilégie aujourd’hui la fiche électronique. C’est incroyable qu’on invalide une candidature à cause d’erreurs ».
Aujourd’hui, à l’heure de la revanche, 5 années plus tard, les victimes du parrainage avancent masquées. Cette fois, ils semblent avoir tiré des leçons de cette fâcheuse expérience. En effet, ils font de l’étape du parrainage leur Mont Everest et montrent une détermination infaillible à la surmonter. Chacun peaufine sa stratégie dans son laboratoire politique. De son côté, le leader de la coalition Gueum Sa Bop, Bougane Guèye Dany semble vouloir se donner toutes les chances de surmonter l’obstacle des parrainages. Pour y arriver, le patron de D-Média a déployé plus de 2700 facilitateurs de parrainage sur le terrain. Au moment où le leader du Grand Parti fait le tour du pays pour convaincre les potentiels parrains à plébisciter sa candidature.
TAS, Abdoul Mbaye et Aliou Ndao, une revanche personnelle contre Macky et ses sbires
S’agissant de l’ancien ministre de l’Énergie limogé, Thierno Alassane Sall, l’ancien premier ministre, Abdoul Mbaye et de l’ex-procureur de la Cour de répression de l’enrichissement illicite, Alioune Ndao, la revanche prend une tournure plutôt personnelle. Leur engagement à briguer le suffrage des sénégalais est sous-tendu par leurs mésaventures avec le président Sall et son régime. L’un d’entre eux a d’ailleurs récemment fait tomber le masque, se montrant ainsi sous son vrai jour. Il s’agit de l’ancien premier ministre Abdoul Mbaye qui semble regretter son compagnonnage avec Macky Sall.
« Je me suis laissé entraîner par le discours de Macky Sall, je croyais en son discours tourné vers les besoins de la population, pour moi il y avait une rupture avec Wade. J’ai accepté de devenir son Premier ministre. (…) après 12 ans de pouvoir, Macky Sall laisse un pays abîmé, en proie à l’instabilité politique et sociale, qui fait craindre une transition chaotique », a déclaré le président de l’Alliance pour la citoyenneté et le travail (Act).
Thierno Alassane Sall et Alioune Ndao montrent la même virulence vis-à-vis du président et de ses sbires. Ils piaffent d’impatience de prendre leur revanche sur ces derniers au soir du 25 février 2024.